Select your country

Not finding what you are looking for, select your country from our regional selector:

Rechercher

Quand la cybersécurité fait son intrusion au cinéma

Une jeune femme mange du pop corn en regardant un film avec son vidéoprojecteur, avec un air enthousiaste.

Décennie après décennie, le cinéma a reflété les préoccupations technologiques, géopolitiques et névrotiques de la société. Hackers anti-système, surveillance de masse, intelligence artificielle incontrôlable, les fantasmes et craintes liées à la cybersécurité ont nourri les intrigues de nombreux techno-thrillers, comédies et films pop-corn. Entre espionnage, voyeurisme, paranoïa, rébellion anti-establishment et intrusion, Orange Cyberdefense vous propose de passer en revue 40 ans de films et séries abordant le thème de la cybersécurité. Un sujet qui en marge du Festival de Cannes 2025 et de la disparition récente de Gene Hackman, nous tenait particulièrement hacker. 

L’ère pré-numérique : les années 70 entre guerre froide, surveillance et paranoïa  

Les années 60 et 70 ont été marquées par un nombre important de transformations sociales, culturelles et géopolitiques. L’émergence de la contre-culture dans la musique, la littérature et au cinéma reflète un sentiment de méfiance vis-à-vis des institutions, teinté d’une pincée de paranoïa. 

L’aulne des années 70 voit poindre une série de films inquiets, posant un regard critique sur l’époque, loin de la poussée d’insouciance (suivie d’un grand chaos de boue) que fut Woodstock. Dans un contexte de guerre froide entre les blocs soviétique et américain, le cinéma US s’intéresse aux technologies d’espionnage, d’écoute et d’intrusion, avant même l’émergence de l’informatique grand public. 

Dès 1968, Stanley Kubrick lie le sort de l’humanité à celui d’une machine paranoïaque. Dans « 2001 l’odyssée de l’espace », HAL, une intelligence artificielle régissant une expédition spatiale à la recherche d’un artefact mystérieux, écoute et suit littéralement les faits et gestes de son équipage, qui devra in fine le débrancher.    

En 1974, le protagoniste isolé de « The Conversation » (« Conversation secrète »), Harry Caul, est un expert privé en surveillance électronique. Interprété par Gene Hackman (ça ne s’invente pas), cet anti-héros passe d’espion à espionné… mais par qui ? Primé à Cannes, ce film singulier de Francis Ford Coppola, réalisé entre « The Godfather » (« Le Parrain ») et « Apocalypse Now » est contemporain d’autres œuvres questionnant les liens entre information, moyens de communication et pouvoir, tels que « All the presidents men » d'Alan J. Pakula (la presse) « Network » de Sidney Lumet (la télévision) ou encore « The Three days of the condor » (le renseignement).  

Ce sentiment de défiance et d’inquiétude, enchevêtré dans les moyens technologiques pré-numériques, se retrouve à la charnière des années 70 et 80 dans « Blow Out » de Brian De Palma. Pour Harry Caul comme pour Jack Terry, il s’agit d’écouter le monde, de le comprendre, de le maîtriser voire de le contrôler au travers des moyens technologiques de l’époque : surveillance électronique pour l’un, équipement de production audiovisuelle pour l’autre. Dans les deux cas, les protagonistes se retrouvent victimes d’une machinerie qui les dépasse et sur laquelle ils n’auront finalement aucune prise. 

Games of Tron : les années 80, le temps des découvertes et des hackers en culotte courte

Après plus d’une décennie de cinéma contestataire et plutôt anxiogène, les Etats-Unis connaissent une forme de revival fifties. Entre la seconde partie des années 70 et le tout début des années 80, le succès à la fois mérité et insolent du duo Spielberg et Lucas redéfinit le cinéma en tant qu’industrie et accompagnent ce revirement. En 1986, le roman « IT » de Stephen King dresse un parallèle entre l’insouciance des années 60 et le capitalisme des années 80.  Sorti un an plus tôt au cinéma, « Back to the future » (« Retour vers le futur » de Robert Zemeckis, poulain de l’écurie Spielberg, juxtaposait également les deux époques, avec un regard nettement plus doux. 

La contestation laisse ainsi place au grand spectacle et à l’entertainment. Les personnages torturés et en quête de sens tels que Harry Caul, Travis Bickle et James Averill laissent la place aux héros premier degré que sont Indiana Jones, Marty McFly ou Luke Skywalker. Cette période est marquée par l’émergence de l’informatique grand public, qui sert à la fois la production des effets spéciaux de ces films familiaux, mais aussi de toile scénaristique. Les premiers ordinateurs personnels et jeux-vidéo sont les hérauts de cette culture bourgeonnante, qui aux Etats-Unis naît sur les cendres encore chaudes de la contre-culture et du flower power. Cela donne une série de films tels que « DARYL », « Explorers », « The Last Starfighter », mais aussi « Short Circuit » et sa suite « Johnny 5 », qui naviguent pour beaucoup entre pop-corn, émerveillement… et guerre froide.  

Et si le cinéma, à l’instar du « E.T » de Steven Spielberg, se met à la hauteur des enfants, il n’en est pas moins intéressant, voire visionnaire par moment. En 1982, malgré un flop injuste lors de sa sortie en salle, le formidable « Tron » connaît une seconde vie en VHS. Cet étrange objet, produit par Disney, 10 ans après « The Computer wore tennis shoes » avec le jeune Kurt Russell, fantasme la vie intérieure des ordinateurs, des programmes et des flux de données. Sous sa couche pop (complice, le film évoque dès les premières minutes la consommation d’un peu de pop-corn), « Tron » marquera au fer rouge et bleu les rétines de millions d’enfants et de futurs codeurs, ingénieurs et développeurs informatiques.  

Bénéficiant des toutes premières avancées en image de synthèse, combinées avec le travail de designers futuristes réputés - Syd Mead et Moebius alias Jean Giraud – « Tron » regorge de visions et de motifs saisissants : 

  • La course des moto lumière (les fameuses « light cycles ») qui évoquent les jeux vidéo mais aussi une forme d’accélération vers ce monde numérique ; 
  • Un disque servant à la fois d’arme et de support numérique pour enregistrer et transmettre des informations, annonçant l’avènement du CD ROM ;  
  • La représentation des flux de données sous forme de villes, de ruisseaux et d’océans luminescents.  

« Tron » oppose deux mondes : d’une part le monde réel et celui des données. Ces deux mondes sont à la fois interconnectés et ignorent tout de l’existence de l'autre. Les programmes voient leurs « concepteurs » comme une sorte de divinité. Et ces derniers ne se doutent pas de la vie infinitésimale et vibrante qui se cache tout près, derrière leur écran. Au cœur de sa trame narrative, qui voit un concepteur de jeux vidéo s’introduire illégalement dans l’enceinte et le réseau informatique d’une société qu’il a largement contribué à bâtir, deux visions de l’informatique moderne se confrontent. D’un côté l’informatique libre, ouverte et synonyme de progrès, visiblement héritée de l’ère hippie et symbolisée par la couleur bleue. 

De l’autre une vision verrouillée et avide de contrôle, représentée par la couleur rouge. On notera d’ailleurs que dans le langage du Pentesting, la Red team est celle des cyberattaquants, cherchant à s’introduire numériquement ou physiquement dans une entreprise et la Blue team celle des défenseurs. 

Obsédée par le contrôle, cette faction se sert des jeux vidéo comme une arène pour éliminer tout programme dissident. A sa tête, l’émergence d’une IA, le « MCP » (« Master Control Program ») veut étendre sa mainmise sur le monde physique, nommément Whashington et le Kremlin. La guerre froide, comme nous le verrons plus loin avec « Wargames » - mais aussi « Terminator » et « DARYL » - n’est jamais très loin.  Ce boss numérique cherche à contrôler le système, puis le monde physique, en le contaminant petit à petit, tandis qu’un groupe de programmes, emmené par un concepteur, tente de lui résister, en recherchant toutes les failles possibles afin de rétablir l’ordre et d’assainir le réseau (qui passe de rouge à bleu).  

En conclusion de cette représentation fantasmée d’une vie binaire, le dernier plan de « Tron » éclipse rapidement les protagonistes humains, qui se saluent d’ailleurs en s’appelant « Programmes », pour montrer la nuit tombant de façon accélérée sur la ville. Dans ce court timelapse mélancolique et visionnaire, les lumières, néons et voies de circulation rappellent les flux de communication luminescents du microcosme IT. Après avoir montré des protagonistes s’acharnant à pénétrer le réseau, de l’extérieur jusqu’à l’intérieur même de celui-ci, le projet ultime du film se révèle en une poignée de secondes : évoquer la juxtaposition en marche du réseau informatique sur les réseaux de transport et le maillage urbain. 

Sous ce prisme, « Tron » signe la transition entre une forme de contre-culture physiologique, intellectuelle est sensorielle  - l'expérimentation tous azimuts du corps, des sens et de lesprit - vers l’émergence d’une culture connectée, dont l’horizon n’est plus seulement l’exploration de l’âme humaine et des rapports sociaux, mais bien celle du monde cyber et de ses liens croissants avec la vie elle-même. 

Réalisée en 2010 par Joseph Kosinski, sa suite « Tron Legacy » (dans le jargon de l’IT, un « legacy system » est une ressource informatique d'ancienne génération), poursuit le rapprochement des deux mondes. Après l’émancipation des gladiateurs face à des tyrans avides de contrôle, on nous parle désormais de l’avènement d’une supra intelligence ni tout à fait humaine, ni tout à fait artificielle, amenée à supplanter la vie même. Dans ce nouveau paradigme, le héros du premier film, pourtant à l’origine de ce nouveau monde, se « retire de l’équation ». 

Le troisième volet, « Tron : Ares » est annoncé pour octobre 2025 et sa bande annonce la couleur : l’omniprésence du rouge, qui dans l’original était celle des tyrans, doublée d’un nom guerrier et d’une accroche explicite « When worlds collide », sonne les trompettes d’une véritable invasion du monde réel. Désormais, les deux mondes vivant jusque-là de façon mitoyenne ne peuvent plus s’ignorer : vont-ils pour autant se déclarer la guerre annoncée par le titre ? 

Si « Tron » évoque la guerre froide entre les Etats-Unis et la Russie, un autre film de cette période plonge pour de bon dans un scénario, catastrophe mêlant géopolitique et technologie. Dès 1983, « Wargames » de John Badham eut l’intelligence d’évoquer les risques d’intrusion informatique à grande échelle, en partant d’un usage domestique de l’informatique grand public naissante. « Wargames » est ainsi l’un des tout premier films faisant ouvertement référence à des questions de cybersécurité au cinéma. 

Tout en conservant la figure du jeune héros pour plaire aux adolescents et aux familles, « Wargames », un an après « Tron », fait partie des premiers films à aborder les questions de piratage informatique et de cybersécurité au cinéma. Après avoir pénétré le réseau de son école pour changer les notes de son bulletin, un adolescent féru d’informatique (interprété par Matthew Broderick, qui connaîtra un autre succès retentissant quelques années après avec « Ferris Bueller's day off »), active par erreur une intelligence artificielle conçue pour répondre aux menaces thermonucléaires. Il enclenche ainsi sans le savoir un scénario de guerre nucléaire entre la Russie et les Etats-Unis. Le tout en croyant jouer à un simple jeu vidéo depuis sa chambre, après en avoir craqué l’accès bien évidemment. « Wargames » posera l’une des premières réflexions autour de la vulnérabilité des technologies informatiques et de leur dangerosité si elles devaient être utilisées à des fins malveillantes et criminelles.

Peu après « Wargames » sort une version en culotte courte destinée au petit écran. Avec la série « Whiz Kids », diffusée sous le nom « Les Petits Génies » en France, un jeune passionné, Richie (joué par Matthew Laborteaux), fabrique son propre super-ordinateur à partir de composants envoyés par son père travaillant à l’étranger. A l’aide de ses amis et d’un journaliste bourru, ils jouent aux pirates informatiques en herbe pour résoudre des enquêtes au nez et à la barbe de la police locale. Son générique sous synthétiseur, qui reprend Mozart façon Wendy Carlos pour Kubrick, est resté dans les mémoires. 

Si « Tron » et « Wargames » sont si importants, c’est qu’ils ont su très tôt évoquer la naissance de l’informatique grand public et les risques à venir. A la même période sort un autre film phare, dystopique et sombre, qui connaître le même chemin de croix et de rédemption que « Tron ». Boudé en salle, le film doit son succès aux vidéo-clubs, aux multiples rediffusions télé et aux éditions physiques successives s’étalant sur 4 décennies. 

Librement adapté du court roman « Do androids dream of electric sheep? » de Philip K. Dick, reconnu aujourd’hui comme l’un des pères du cyberpunk, « Blade Runner » dépeint un monde submergé par la cybernétique et la technologie, dans lequel l’intelligence artificielle réclame sa part de vie. Harrison Ford, qui interprète le « Blade Runner » éponyme, sonde l’âme humaine à l’aide d’un test, dit test de Voight-Kampff. Cette séquence s’inspire du test de Turing qui, dès les années 50 annonçait la faculté croissante d’une machine à imiter la conversation humaine.  

En 1985 « Explorers » de Joe Dante reprend le « Club des 5 » vu dans les « Goonies » et « Whiz Kids ». Mozart est également de la partie puisque le personnage de River Phoenix, en énième variation du petit génie de l’informatique, se prénomme Wolfgang. Et celui-ci décrypte un signal extra-terrestre qui les envoie lui et sa bande dans l’espace. Pour y trouver l’origine de l’humanité comme dans « 2001: A space odyssey » ? Non. En guise de conclusion de ce conte philosophique en culotte courte, les adolescents se retrouvent nez à nez avec leurs équivalents d’un autre monde, miroir déformant de leur propre addiction à la pop culture et aux écrans. 

Dans la seconde partie de notre « série » consacrée aux films et oeuvres audiovisuelles abordant la cybersécurité et le piratage informatique, vous découvrirez comment les années 90 puis 2000, 2010 et 2020 se sont emparées du sujet. 

TO BE CONTINUED...

Réponse à incident

Vous faites face à une cyber attaque ?

24/7/365 nos experts vous accompagnent réponse à incident.

CSIRT